mardi 25 août 2009

Mulidi


Vers la fin des vacances, la mère d’une de mes anciennes petites élèves nous a invités à assister à un mulidi. Nous avons donc repris la route de Mtsamboro. Nous avons mangé chez cette dame et avons passé une partie de la soirée à discuter. Puis elle nous a sorti un matelas pour dormir un peu avant le mulidi car c’était un grand mulidi qui ne devait commencer que très tard le soir. Pas avant minuit.

Un mulidi c’est une cérémonie religieuse organisée par une confrérie masculine, il s’agissait ce soir-là de la Qadiriyya. Au cours de cette cérémonie, les participants chantent et dansent à genoux sur des matelas en exécutant de remarquables mouvements d’ensemble. C’est le pendant masculin du déba dont j’ai déjà parlé.



Vers minuit et demi, nous nous sommes levés pour aller voir comment les choses se présentaient. Dans la rue principale du village, un dais avait été dressé pour abriter la cérémonie. Sous le dais, le sol était couvert de tapis et l’ensemble était entouré de bancs.
Les participants formaient un grand rectangle dont une longueur était occupée par un double rang de danseurs. Un premier rang agenouillé sur les matelas, de jeunes hommes, et un second rang debout derrière ce premier rang, des hommes plus mûrs. En face et sur les côtés, il y avait des personnages que je qualifierais volontiers de dignitaires car c’étaient les plus âgés de l’assemblée. Hors de ce rectangle, mais toujours sous le dais, profondément endormis, allongés sur les tapis, serrés les uns contre les autres, une bonne vingtaine de garçons que leurs maîtres coraniques avaient amenés avec eux. Le reste de la rue était occupé par de nombreux spectateurs, habitants du quartier, assis sur le bord du trottoir ou debout, adossés aux murs.

Les chants sont soutenus par les tari et un patsu, une sorte de petit gong

Les participants venaient de toute l’île. C’était un de ces grands mulidi comme on n’en fait qu’une fois tous les trois ans à Mtsamboro. J’ai appris le lendemain qu’une association d’éleveurs avait livré quinze zébus pour cette occasion. Chaque quartier du village était chargé d’accueillir et de nourrir tel ou tel village invité.

La cérémonie commence par des prières et des invocations psalmodiées dans la fumée de l’encens. Puis viennent ces fameuses danses. Les danseurs se relaient jusqu’au petit matin. Notre hôtesse faisait des allées et venues de la rue à chez elles où ses enfants dormaient. Comme nous pensions que nous la tenions éveillée par souci d’hospitalité, nous avons pris congé vers deux heures du matin.



Parmi les dignitaires, il y en avait un qui secouait une sorte de gros hochet, un instrument comme je n’en avais encore jamais vu. Mais, placé comme je l’étais, je ne distinguais pas bien ce que c’était. Je le filmai en gros plan pour avoir le lendemain, dans l’ordinateur, une image plus nette de son instrument.

Le lendemain, effectivement, l’image était plus nette. En fait d’instrument, c’était une botte de dabbus que le bonhomme secouait rituellement dans la fumée de l’encens. Un dabbus c’est une sorte de longue aiguille emmanchée. Le manche porte une petite plaque de métal qui tinte quand on agite l’objet. En fin de cérémonie, certains participants demandent au cheik l’autorisation de se transpercer les joues ou les avant-bras pour prouver publiquement l’efficacité des pratiques religieuses de la confrérie. Si le sang ne coule pas, c’est que l’adepte est soutenu par Dieu. Si le sang coule, cela ne compte pas, c’est tout au plus l’œuvre des djinns.

Officiant agitant une botte de dabbus

J’aurais bien aimé vous montrer ceci, mais nous sommes partis trop tôt. En partant, cela aurait dû me mettre la puce à l’oreille, j’ai vu un dignitaire qui testait avec ses dents la solidité de la lame d’une épée. J’ai appris par la suite qu’avec cette épée l’officiant se livrait à des pratiques de guérisons miraculeuses. Vous ne verrez malheureusement rien de tout ceci. Toutefois, en cliquant ici, vous verrez un bel extrait d’une danse et en cliquant là, vous entrapercevrez, de dos, le cheik secouant ses dabbus.

Pour une information plus fournie sur ce genre de cérémonies qui ont cours dans tout l’Océan Indien, je vous invite à cliquer ici pour télécharger un dossier pdf réalisé par l’auteur des dossiers consacrés au gabusi que je vous ai déjà signalés.

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